Une occasion de miracle

Cet article fait partie du dossier thématique Covid-19

Cet article est une proposition de méditation écrite en mars 2020 pour la paroisse réformée du Jorat. Elle est proposée ici dans une version adaptée pour le blog.

Comme il descendait de la montagne, de grandes foules le suivirent. Voici qu’un lépreux s’approcha et, prosterné devant lui, disait: « Seigneur, si tu le veux, tu peux me purifier. » Il étendit la main, le toucha et dit: « Je le veux, sois purifié! » À l’instant, il fut purifié de sa lèpre. Et Jésus lui dit: « Garde-toi d’en dire mot à personne, mais va te montrer au prêtre et présente l’offrande que Moïse a prescrite: ils auront là un témoignage. »

Evangile selon Matthieu (Mt 8:1-4)

La Bible ne traite pas du coronavirus – c’est plutôt la lèpre qui était d’actualité. Je relève cependant que les effets de la maladie et du virus se rejoignent puisque tous deux impliquent une exclusion de la vie sociale, la personne potentiellement touchée devant se tenir à l’écart pour ne pas risquer d’infecter les bien-portants. Ce n’est qu’une fois le risque écarté que la personne peut réintégrer la société.

Pour en avoir une meilleure idée, vous pouvez vous (re)plonger dans Lévitique, aux chapitres 13 et 14 – qui présentent respectivement les indications pour le diagnostic et les règles qui s’appliquent à la personne potentiellement infectée (Lv 13) et les rites de purification qui marque la réintégration sociale (Lv 14). Ces textes sont d’une actualité inattendue.

Cela permet de resituer la rencontre de Jésus avec le lépreux: il ne lui redonne pas seulement la santé, mais aussi une place dans la société, une place parmi les vivants.

Pour vous approprier ce texte, je vous propose de nous arrêter sur trois points.

La bienveillance de Dieu

« – Si tu le veux, tu peux me purifier. – Je le veux, sois purifié! »

Jésus veut la guérison et non la maladie. Il n’a pas guéri tout le monde, mais à travers chaque rencontre, il manifeste la bienveillance de Dieu pour les humains, pour chaque humain dans ce qu’il vit. La question n’est pas de savoir d’où vient la maladie, mais simplement de la reconnaître comme une situation dans laquelle Dieu peut intervenir et intervient. Le virus nous rappelle que nous ne sommes pas maîtres du contexte dans lequel nous vivons, et notre foi nous rappelle que ce contexte est celui où Dieu vient nous rencontrer.

Dans ce que nous vivons actuellement, que ce soit le contexte global ou notre situation plus particulière, comment vivons-nous la bienveillance de notre Dieu? À quelles occasions l’avons-nous vécue, ressentie? C’est parce que nous vivons de cette bienveillance qu’elle a du sens pour nous, qu’elle n’est pas un mot creux.

Et nous-mêmes, comment pouvons manifester notre bienveillance aux personnes que nous croisons (de loin) de notre fenêtre, notre jardin ou au fil de nos balades? Et comment manifestons-nous notre bienveillance aux personnes qui nous sont chères mais dont nous sommes actuellement éloignés? Nous ne pouvons pas les guérir et nous sommes appelés à ne pas les voir, mais nous pouvons imaginer d’autres possibilités. Même mieux, notre souci pour eux peut stimuler notre ingéniosité.

La discrétion de Jésus

Pourquoi Jésus tient-il à éviter que la guérison soit annoncée partout? Le texte ne répond pas explicitement à cette question, si bien que nous devons prendre le risque de l’interprétation. Celle que je vous propose n’est pas la seule, mais elle a le mérite de nous faire cheminer.

Si nous nous focalisons sur le miracle et cherchons à le reproduire, nous passons à côté de l’essentiel. Le miracle est le signe d’autre chose; l’enjeu n’est pas de savoir comment le reproduire (c’est au-delà de nos compétences), mais de découvrir ce qu’il nous dit de Dieu, de son engagement à nos côtés. Si nous passons à côté de cela, alors nous continuerons à vivre comme avant et le miracle aura été inutile…

Revenons à notre actualité. Nous faisons l’expérience de ce que c’est que de vivre confiné. Aussi problématique que celui puisse être, c’est l’occasion de découvrir autre chose, de développer autre chose: approfondir un sujet, prendre le temps de s’arrêter, de méditer, de jouer d’un instrument, de passer du temps en famille… Même dans cette situation, beaucoup de choses sont possibles! Après l’épreuve de la maladie, le lépreux voit sa vie transformée par la guérison. Après l’expérience du confinement et des restrictions, la levée des mesures transformera aussi nos vies. Plutôt que de nous focaliser sur la sortie du confinement, voyons quel élan de vie nous porte en avant… pour qu’il puisse continuer à nous porter ensuite.

Faire constater la guérison

Jésus ne s’arrête pas à la guérison, il envoie le lépreux faire reconnaître celle-ci par le prêtre. Le fait que nous vivions une transformation est important et le fait qu’elle soit constatée par d’autres, qu’elle soit officiellement reconnue est important aussi. Cela nous rappelle que l’action de Dieu dans notre vie n’est pas une affaire privée puisque ses conséquences sont constatables aussi par les personnes qui nous entourent.

Même si nous vivons le confinement, même si le virus progresse et touche nos proches et/ou nous-mêmes, nous avons notre place parmi les vivants. Le miracle consiste en cela. Et la guérison permet aux personnes qui nous entourent de se réjouir avec nous.

Cela nous ramène aux points précédents: la bienveillance de Dieu nous transforme pour ensuite rejaillir sur d’autres. C’est le miracle que nous pouvons vivre même dans le confinement et sous les restrictions sanitaires.

Amen

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Nicolas Merminod

Nicolas est pasteur dans l’Église réformée vaudoise dans la paroisse du Jorat. Membre du Care Team Vaud, il fait du soutien psychologique d’urgence sur mandat de la gendarmerie vaudoise. Dans un  registre plus léger, il profite des largesses du temps (météorologique et temporel) pour aller grimper.

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